
Une entreprise française a vendu des logiciels espions israéliens à des pays autoritaires (médias)
Publié le 6.10.2023
Une entreprise française spécialisée dans la cyberdéfense a vendu des logiciels espions à des pays autoritaires, ayant notamment permis de surveiller des opposants, selon une enquête collective publiée jeudi de plusieurs médias internationaux, dont le site français Mediapart.
Les dernières révélations de Mediapart font l’effet d’une bombe. Accrochez-vous, cela va secouer dans les couloirs de l’Élysée ! Le nom du deuxième protagoniste nous est familier : Alexandre Benalla. Encore lui. Souvenez-vous, l’ex-chargé de mission au palais de l’Élysée avait été licencié en juillet 2018 après avoir été identifié sur des vidéos en train de tabasser violemment des manifestants à Paris le 1er mai de la même année. Tout est parti d’une enquête menée sur la société Nexa, soupçonnée de « complicité de torture » pour avoir livré des systèmes de surveillance à la Libye et à l’Égypte. Après un contact direct avec le chef de l’État, la société française de cybersurveillance a utilisé Alexandre Benalla comme intermédiaire pour tenter de vendre des logiciels espions à l’Arabie Saoudite. Aucun état d’âme du côté de Nexa à faire du business avec un tel régime sanguinaire.
« Le groupe français Nexa a vendu le logiciel espion Predator, capable de pirater les téléphones portables, a au moins trois autocraties : l’Égypte, le Vietnam et Madagascar », montrent les documents obtenus par Mediapart et Der Spiegel, dans le cadre d’une enquête coordonnée par le réseau European Investigative Collaborations (EIC).
Predator a été conçu par Intellaxa, un groupe piloté par des anciens des services secrets israéliens surtout basé en Europe, et déjà visé par des sanctions américaines en juillet.
Nexa a aussi fourni « d’autres matériels d’espionnage, dont un système de surveillance de masse de l’Internet, à de nombreuses autres dictatures, sous le regard complaisant des services secrets français, et sans que l’État y trouve à redire », accuse Mediapart qui cite par exemple le Qatar, le Congo Brazzaville, les Émirats arabes unis et le Pakistan.
Selon les auteurs de l’enquête, « les autorités ne peuvent ignorer que ces régimes illibéraux acquièrent ce matériel de pointe pour surveiller, réprimer, parfois emprisonner ou tuer leurs opposants politiques, des journalistes et des militants des droits de l’homme ».
Accusée d’avoir vendu du matériel de cybersurveillance au régime du président Al-Sissi en Egypte qui lui aurait permis de traquer des opposants, la société Nexa et quatre de ses dirigeants avaient effectivement été mis en examen en novembre 2021. La justice avait toutefois annulé ces inculpations en décembre 2022 pour les placer sous le statut de témoin assisté, éloignant ainsi la menace d’un procès à leur encontre, selon des sources judiciaires à l’AFP.
Le sujet des logiciels espions privés a surgi sur le devant de la scène internationale à la suite des révélations en cascade autour du logiciel Pegasus, exporté par la société israélienne NSO Group.
En juillet 2021, une enquête coordonnée de plusieurs médias avait révélé une liste de plus de 50.000 noms d’individus susceptibles d’avoir été surveillés via Pegasus. Ces allégations ont déclenché des scandales et des procédures judiciaires dans plusieurs pays.
« Les révélations +Predator Files+ (…) nous apprennent que la France et de nombreuses démocraties européennes ne se comportent guère mieux, en laissant ces industriels de l’espionnage prospérer au mépris des droits humains les plus élémentaires », affirme Mediapart.
Source: AFP
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