Q INFOS – J. Assange : Le 4 janvier, la justice britannique décidera de l’extrader ou non !


Lundi 4 janvier 2021, la justice britannique décidera d’extrader ou non le journaliste et fondateur de WikiLeaks vers les États-Unis, où il risque 175 ans de prison pour avoir partager des informations d’intérêt général à des journalistes.

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Publié le samedi 26 décembre 2020 par Serge Halimi 

Depuis qu’il a été chassé de l’ambassade d’Équateur à Londres, où il faisait l’objet d’une surveillance permanente de la part de la CIA, Julian Assange est détenu par les autorités britanniques. Le verdict du procès portant sur son extradition est attendu le 4 janvier 2021.

S’il est extradé vers les États-Unis, Assange risque plus d’un siècle de prison au titre de l’Espionage Act. C’est la première fois dans l’histoire que cette loi serait utilisée contre un journaliste titre que lui dénie la justice américaine. Pour le lanceur d’alerte Edward Snowden, lui aussi visé par l’Espionage Act, cette affaire décidera de l’avenir des médias en général.

Il fut un temps où les médias dominants considéraient Assange comme un héros de la liberté d’expression : WikiLeaks publiait alors ses révélations par l’intermédiaire des grands journaux. Mais, depuis la divulgation en 2016 des courriers internes du Parti démocrate américain, les journalistes ont lâché le lanceur d’alerte, qui croupit en prison pour avoir dit la vérité.

Solidaire du fondateur de WikiLeaks, Le Monde diplomatique rassemble ci-dessous, grâce à son réseau international, toutes les traductions disponibles de l’éditorial que lui consacrait Serge Halimi en décembre 2018.

Pour Julian Assange

par Serge Halimi :

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3:52 • Lu par Arnaud Romain

Fier comme Artaban, souriant, entouré d’une cinquantaine de photographes et de cadreurs, Jim Acosta a opéré, le 16 novembre dernier, son retour en fanfare à la Maison Blanche. Quelques jours plus tôt, il avait perdu son accréditation de correspondant de Cable News Network (CNN), mais la justice américaine a obligé le président Donald Trump à annuler la sanction. «C’était un test, et nous l’avons passé avec succès, a fanfaronné Acosta. Les journalistes doivent savoir que, dans ce pays, la liberté de la presse est sacrée, et qu’ils sont protégés par la Constitution [pour] enquêter sur ce que font nos gouvernants et nos dirigeants. » Fondu enchaîné, musique, happy end…

Réfugié depuis six ans à l’ambassade d’Équateur à Londres, M. Julian Assange n’a sans doute pas pu suivre en direct sur CNN un dénouement aussi émouvant. Car son existence à lui ressemble à celle d’un prisonnier. Interdiction de sortir, sous peine d’être arrêté par les autorités britanniques, puis, sans doute, extradé vers les États-Unis; communications réduites et brimades de toutes sortes depuis que, pour complaire à Washington, le président équatorien Lenín Moreno a résolu de durcir les conditions de séjour de son «hôte» (lire «En Équateur, le néolibéralisme par surprise»).

La détention de M. Assange ainsi que la menace de quelques dizaines d’années de prison dans un pénitencier américain doivent tout au site d’information qu’il a fondé. WikiLeaks est à l’origine des principales révélations qui ont indisposé les puissants de ce monde depuis une dizaine d’années : images des crimes de guerre américains en Afghanistan et en Irak, espionnage industriel des États-Unis, comptes secrets aux îles Caïmans. La dictature du président tunisien Zine El-Abidine Ben Ali fut ébranlée par la divulgation d’une communication secrète du département d’État américain qualifiant cette kleptocratie amie de Washington de «régime sclérosé» et de «quasi-mafia». C’est également WikiLeaks qui révéla que deux dirigeants socialistes français, MM. François Hollande et Pierre Moscovici, s’étaient rendus, le 8 juin 2006, à l’ambassade des États-Unis à Paris pour y regretter la vigueur de l’opposition du président Jacques Chirac à l’invasion de l’Irak.

Mais ce que la «gauche» pardonne moins que tout à M. Assange, c’est la publication par son site des courriels piratés de la campagne de Mme Hillary Clinton. Estimant que cette affaire a favorisé les desseins russes et l’élection de M. Trump, elle oublie que WikiLeaks a alors dévoilé les manœuvres de la candidate démocrate pour saboter la campagne de M. Bernie Sanders durant les primaires de leur parti. À l’époque, les médias du monde entier ne s’étaient pas privés de reprendre ces informations, comme ils l’avaient fait pour les précédentes, sans pour autant que leurs directeurs de publication soient assimilés à des espions étrangers et menacés de prison.

L’acharnement des autorités américaines contre M. Assange est encouragé par la lâcheté des journalistes qui l’abandonnent à son sort, voire se délectent de son infortune. Ainsi, sur la chaîne MSNBC, l’animateur-vedette Christopher Matthews, ancien cacique du Parti démocrate, n’a pas hésité à suggérer que les services secrets américains devraient «agir à l’israélienne et enlever Assange»…


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